Le paradis perdu. Le regard de l’ange
Dans le cadre de A l’est d’Eden. Le jardin s'expose Des expositions, des installations et des manifestations transforment l’ensemble du complexe, alentours compris, en un parc à thème dynamique qui tisse des liens aussi fascinants que variés entre les espaces intérieurs et extérieurs.
«Il existe un tableau de Klee qui s’intitule «Angelus Novus». Il représente un ange qui semble être sur le point de s’éloigner de ce sur quoi son regard est fixé. Ses yeux sont écarquillés, sa bouche ouverte, ses ailes déployées. C’est ainsi qu’on se représente l’ange de l’histoire. Il a le visage tourné vers le passé. Là où nous voyons une succession d’événements, il ne voit qu’une seule et unique catastrophe, qui ne cesse d’amonceler ruines sur ruines et les jette à ses pieds. Il voudrait bien s’attarder, réveiller les morts et réunifier ce qui a été brisé. Mais une tempête souffle, parvenant du paradis ; elle se prend dans ses ailes, si violemment que l’ange ne peut plus les replier. Cette tempête le pousse irrésistiblement vers le futur auquel il tourne le dos, cependant que, devant lui, s’amassent les débris montant jusqu’aux cieux. Cette tempête est ce que nous appelons le progrès.» (Walter Benjamin)
En parallèle à l‘exposition Paul Klee au jardin des merveilles, l’envers du jardin est étudié sous le titre Le paradis perdu – Le regard de l’ange, en tant que lieu de retraite arcadienne. Les fondements de l‘exposition reposent sur l’œuvre de Paul Klee «Angelus Novus» qui a servi d’allégorie visuelle au philosophe Walter Benjamin pour son ange de l’histoire. Le paradis perdu tente de suivre le regard effrayé que l‘ange de l’histoire jette du haut du paradis sur les catastrophes du monde. Grâce à un extraordinaire et heureux concours de circonstances, la précieuse oeuvre peut quitter le musée d’Israël à Jérusalem pour rejoindre le Zentrum Paul Klee. Pas moins de cent cinquante objets et œuvres d‘artistes du présent et du passé se conjuguent pour montrer l’envers du jardin des merveilles de Klee: les décombres du progrès, le monde de la destruction, l’errance des hommes, la lutte pour la survie; mais aussi l’essai toujours renouvelé, dans ce «parc que l’on croyait mort » (Rainer Maria Rilke) de s’imaginer et de faire revivre à sa manière le paradis perdu. Le couple d’artistes Gerda Steiner et Jörg Lenzlinger créent une sorte de végétal dessinant des arabesques chargées de feuilles, de fruits blets, de pommes primées, orné de bourgeons d’arbres, de lampes parsemées ci et là, de caissières ivres de samba, de formations de cristaux, de bois de cerf et d’hortensias, de tubercules en crottin de cheval, d’amusants cactus séchés, de graines volantes et de campanules en Novilan. Ce «pêle-mêle» prolifère en une installation envahissante qui remplit l’espace, se développe par delà la Museumsstrasse pour entrer dans le jardin des merveilles de Paul Klee et descendre vers le paradis perdu.